DRH : du gestionnaire du personnel au stratège de l’humain
Luc Delpech est DRH chez ADSN depuis 7 ans. Le groupe, spécialisé dans la digitalisation du notariat, compte 500 collaborateurs. Il nous livre sa vision du métier de DRH : sa transformation, ses défis d'aujourd'hui et de demain.
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Comment la fonction de DRH a-t-elle évolué ces dernières années ?
Luc Delpech : la principale transformation réside dans la prise en compte des individualités. La crise du COVID a été un véritable tournant. Pour la première fois, nous avons dû considérer la vie privée des salariés pour organiser le télétravail. À cette période, très anxiogène, l’entreprise était leur principal repère. Chaque annonce gouvernementale à la télévision suscitait des dizaines de questions dès le lendemain sur son application en interne.
Cette évolution a modifié le rapport au travail. Depuis 2020, les salariés souhaitent une meilleure prise en compte de leur équilibre personnel. Pour garder les talents, nous avons dû trouver des solutions. Ainsi, nous avons ainsi mis en place des jours pour enfant malade et permis le télétravail occasionnel pour raisons personnelles. Autrefois, ce type de demandes était quasi inexistant. Il faut faire du cas par cas. En ce sens, les outils de TTI Success Insights m’ont aidé : repérer les personnalités, mieux communiquer, me détacher de l’affectif pour mieux exercer mon métier.
Aujourd’hui, on est en train de revenir un peu dessus. On est allé dans l’extrême, à dire oui à tout. Récemment, j’ai refusé à un collaborateur de se mettre en télétravail pour partir en vacances à l’étranger en famille. Hier, j’aurai accepté.
La perception du rôle du DRH a aussi changé ?
Indéniablement. Autrefois perçu comme un simple responsable du personnel, le DRH est aujourd’hui un acteur central de l’organisation. Il est devenu un véritable numéro deux, devant maîtriser tous les aspects de l’entreprise et en saisir les enjeux.
Notre mission est d’accompagner les décisions stratégiques. Le dirigeant définit la vision, mais c’est à nous d’analyser son impact sur les salariés et de l’adapter. D’où l’importance d’être présent au CODIR, afin de fournir un retour terrain en temps réel. La décision finale appartient à la direction, mais c’est à nous d’embarquer l’ensemble des collaborateurs dans cette dynamique.
DRH : un mal nécessaire ?
Je me définis plutôt comme le garant de l’organisation et de l’équilibre entre stratégie et capital humain. Mon rôle est d’assurer le respect du droit du travail, tant pour l’employeur que pour les salariés. J’accompagne la direction en identifiant les risques humains liés aux choix stratégiques.
Ma mission est d’assurer la bonne compréhension de ces enjeux par les managers et les salariés, et de leur proposer des solutions pour les mettre en œuvre efficacement. En somme, je suis un facilitateur de la stratégie et un acteur de la pérennité de l’entreprise.
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Parmi les défis des prochaines années : l’arrivée de la nouvelle génération, la Gen Z, sur le marché du travail. Elle est difficile à intégrer ?
Il ne faut pas généraliser, mais contrairement aux idées reçues, la génération Z n’a pas peur du travail. Toutefois, certains adoptent une approche nouvelle : ils veulent travailler à leur rythme et selon leurs besoins. Par exemple, nous avons un intérimaire très compétent à qui nous avons proposé un CDI. Il a refusé, préférant alterner six mois de travail et six mois de voyage.
Nous faisons face à des difficultés de recrutement et de rétention, car leur implication est différente de celle des générations précédentes. Ils effectuent leur travail consciencieusement, mais une fois leur journée terminée, ils partent sans chercher à en faire plus. Ils privilégient leur vie personnelle et, après quelques années, ils cherchent du changement. Aujourd’hui, notre principal levier pour les attirer et les fidéliser reste la qualité de vie au travail et la valorisation de notre marque employeur.
Deuxième défi, l’IA ?
Dans le secteur des ressources humaines aujourd’hui, on ne se sert pas de l’IA dans mon entreprise, sauf pour de la rédaction d’offre d’emploi ou pour des textes avec des mots de la marque employeur.
Par contre, ça nous demande de la prospective. Dans notre organisation, quels seront les métiers les plus impactés ou qui vont disparaître ? On a fait une cartographie. Et pour les premiers employés qui risquent d’être touchés, pour éviter des pertes d’emplois, nous sommes en train de les former.
Il faut être à l’affût, parce que quand la direction décidera de se servir de l’IA, il faudra être très réactifs, et que, par exemple, la charte éthique soit prête.