Les défis RH dans le secteur du luxe : la guerre des talents

Plus de 20 000 postes sont actuellement à pourvoir dans le secteur du luxe, notamment dans les métiers artisanaux tels que la maroquinerie, la haute couture et l’horlogerie. Des maisons emblématiques comme Hermès tentent de répondre à la demande croissante, mais le défi de la relève reste majeur. L’attractivité du secteur pâtit des aspirations des jeunes générations, en quête de sens, de flexibilité et d’un environnement de travail épanouissant.

Un secteur sous tension

“Le secteur du luxe est, pour une fois, challengé”, explique Valérie Borne, spécialiste des RH avec 20 ans d’expérience dans le secteur du luxe.

"Après une croissance artificielle post-COVID, le secteur vit un ralentissement lié à des facteurs économiques et géopolitiques, mais aussi à une certaine “fatigue du luxe”. Pourtant, comme le souligne la dernière étude de Bain and Company de nouveaux marchés émergent, comme l’Afrique, l’Inde ou le Brésil, ainsi que le développement de la clientèle “Silver” (les plus de 50 ans), promettent des perspectives positives à moyen terme.”

Cette nouvelle clientèle cherche à vivre des expériences uniques, que ce soit pour les voyages, les hôtels ou quand elle achète n’importe quel produit de luxe. Et cela nécessite, dès aujourd’hui, un focus client dans les boutiques : les services, une réponse aux attentes très fortes de ces nouveaux clients. “Ce qui passe par des équipes formées, motivées et alignées avec les attentes des consommateurs” explique Pierre Poy-Tardieu, responsable Grands Comptes chez TTI Success Insights France.

“Pour un conseiller de vente, par exemple, mieux se connaître, c’est aussi mieux répondre aux attentes et exigences de cette clientèle spécifique. Certaines grandes marques l’ont déjà compris et ont accompagné leurs équipes.”

Réinventer le recrutement et la fidélisation

Cette transition ne se fait pas sans conséquences pour les équipes.

“Il y a une véritable guerre des talents, avec une forte volatilité. D’un côté, des profils statutaires souhaitent rester en poste pour la sécurité qu’ils y trouvent, dans un moment où l’incertitude est grande pour tout le monde. De l’autre, des talents en quête de challenge changent d’entreprise pour trouver plus d’autonomie”, selon Valérie Borne. “Ce sont les plus petites marques qui sont en difficulté, elles ne peuvent pas rivaliser avec les mêmes armes que Vuitton par exemple. Il faut trouver autre chose.”

Pour relever ces défis, le secteur doit repenser ses pratiques RH. L’approche traditionnelle, centrée sur les CV et les parcours académiques, ne suffit plus. Il devient essentiel de comprendre en profondeur les profils, leurs comportements, et leurs motivations.

Comme l’illustre Valérie Borne :

“Dans des entreprises en crise comme ce fut le cas chez Coty, j’ai pu stabiliser les équipes en misant sur l’écoute, l’attention portée aux managers et des parcours personnalisés. Il faut aller au-delà des process standards pour instaurer une culture de la confiance et accompagner les collaborateurs de manière sur-mesure.”

En 2030, le secteur du luxe devra répondre à l’arrivée de 50 milliards de nouveaux consommateurs issus de la classe moyenne dans les pays émergents.

Les maisons qui auront su anticiper et transformer leurs pratiques RH dès aujourd’hui seront prêtes pour ce nouveau chapitre de leur histoire.