Recruter et fidéliser les seniors : l’enjeu n°1 des RH en 2023
Face à l’allongement des carrières et à la mise en place de l’index senior, recruter et fidéliser devient obligatoire pour les entreprises. Comment conserver les seniors jusqu'à la retraite ? Isabelle Carbon, cofondatrice et DRH de G3 Concepts mais aussi coach certifiée et conférencière professionnelle, et Benoît Eche, consultant et directeur associé du cabinet MarcoPolo, décryptent le sujet.
L’index senior : de quoi on parle ?
Le projet de réforme des retraites prévoit la publication annuelle et obligatoire par les entreprises d’un document justifiant leur taux de salariés de plus de 55 ans. L’initiative portée par le gouvernement vise à encourager et à valoriser l’emploi des seniors.
La réforme des retraites aura-t-elle un impact sur la gestion des RH en entreprise ?
Isabelle Carbon : Oui forcément, notamment au niveau de la gestion des carrières. Les enjeux en termes de fidélisation et de montée en compétences seront d’autant plus importants pour les RH. Et ça relance aussi le sujet de valeur travail : maintenir les seniors en activité, ok, mais encore faut-il qu’ils en aient envie ? Sont-ils prêts à être managés par des plus jeunes ou avec des méthodes différentes ?
Mais alors, comment leur donner envie, les fidéliser ?
Ça se joue sur plusieurs leviers. Tout d’abord en redonnant du sens à leur travail, c’est une des principales clés de l’engagement. Cela passe par une écoute attentive de leurs besoins et de leurs attentes en termes de missions et de manières de travailler. L’entreprise doit faire preuve de souplesse et d’agilité. Et ce, en favorisant la mobilité interne par exemple. Les seniors ont également besoin d’avoir des perspectives de fin de carrière, une vision claire de leur mission et de ce qu’on attend d’eux.
Comment les maintenir à niveau ?
Fidéliser c’est aussi être en capacité de miser sur les compétences des collaborateurs et de les accompagner au travers du coaching et de la formation. Les RH doivent donc déployer des parcours de formation pour que les seniors restent employables et efficaces dans leurs fonctions. Un autre levier concerne la transmission intergénérationnelle du savoir. Elle permet aux seniors d’apprendre des plus jeunes (notamment sur le volet numérique), et de partager à leur tour.
Et pour ceux qui souhaitent recruter des seniors, comment doivent-ils s’y prendre ?
En identifiant les valeurs, les motivations et l’environnement propices à l’engagement du candidat. Et en trouvant l’adéquation entre ses valeurs et celles de l’entreprise, entre ses missions et la raison d’être de l’organisation... C’est tout l’enjeu du recrutement. L’employeur doit pouvoir partager sa vision et ses ambitions pour que le candidat puisse se projeter et s’identifier. Et ainsi savoir s’il correspond au poste ou non. Mettre la bonne personne à la bonne place, c’est tout l’intérêt de la fonction RH. Et c’est la clé pour maximiser le recrutement !
Parce que concrètement, quelles sont les motivations des seniors ?
Les motivations intrinsèques sont propres à la personne, pas à son âge. Mais les besoins sont différents selon les tranches d’âge. Notamment en termes de salaire, d’équilibre de vie, de mission, de santé et de pénibilité.
Comment les RH peuvent-ils accompagner les seniors ?
En les aidant à maîtriser leur parcours professionnel. Par exemple en leur proposant un bilan de compétences, pour identifier leurs atouts et savoir comment les mobiliser. C’est un véritable coup de boost pour leur fin de carrière qui leur permet d’évoluer comme ils le souhaitent et le peuvent. En clair, de les accompagner selon leurs envies. Mais le bilan de compétences c’est aussi la possibilité pour les seniors de faire un point sur eux, sur leurs besoins, sur qui ils sont réellement... Pour in fine avoir une meilleure connaissance d’eux. Il n’est jamais trop tard !
L’art de réenchanter le travail
Le report de l'âge de départ à la retraite pose la question de la motivation dans la durée. Comment ré-engager les collaborateurs au travail ? Benoît Eche se penche sur le sujet.
Le rapport des collaborateurs au travail a-t-il changé ?
Benoît Eche : La crise sanitaire a accéléré le changement de mentalité. Les gens veulent changer de vie, être plus indépendants, avoir un meilleur équilibre de vie. Et ce fut aux RH qu’est revenu la responsabilité de les remettre au travail, en tenant compte des nombreux chamboulements tels que l’essor du télétravail.
Quelle est leur mission concrètement ?
Je pense qu’il appartient aux entreprises de réenchanter le travail et le moment de travail des salariés à travers deux acteurs clés. Tout d’abord les RH, pour la mise en place d’actions fortes pour transformer la relation du collaborateur au travail : télétravail, cadre de travail, avantages divers, semaine de quatre jours, accompagnements coaching et formation à la carte, parcours d’intégration... Et également les managers, par un suivi et un accompagnement plus efficace de leurs collaborateurs : focus sur leur motivation, leur montée en compétences, le feedback, l’animation de moments de cohésion d’équipe, etc. Il s’agit de prendre en compte les notions de pénibilité, de stress, de qualité de vie au travail, de flexibilité, d’écoute active, de communication et de rencontres... Et ce, en réorientant le travail des collaborateurs sur des tâches plus valorisantes et en capitalisant sur leurs compétences.
