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Salariés boomerang : ces employés qui partent pour revenir

Connaissez-vous les salariés boomerang ? Ces collaborateurs qui quittent leur entreprise pour mieux la retrouver quelques mois ou années plus tard. Face à la Grande démission que traverse la France, la réintégration d’anciens collaborateurs est-elle la solution ?
Rencontre avec Charlotte Brun, une salariée boomerang, et Clara Trevisiol, une dirigeante qui a récemment réintégré un collaborateur.

Le 13 déc. 2022 Illustration Salariés boomerang : ces employés qui partent pour revenir
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Qui sont ces salariés boomerang ?

65% des salariés français souhaiteraient réintégrer leur ancienne entreprise si l’opportunité se présentait. Parmi eux, seulement 20% reviennent (1). Ces salariés boomerang sont majoritairement des hommes (deux fois plus nombreux que les femmes), de statut cadre (32%) et issus des grands groupes, des PME ou des ETI, tous secteurs d’activité confondus. Ce profil est pourtant amené à se diversifier, tant ce phénomène semble prendre de l’ampleur.

Pourquoi partent-ils ?

Les causes de démission des salariés boomerang sont nombreuses. Bien que la rémunération constitue le premier motif de départ, ce n’est pas la seule. 51% des collaborateurs partent pour d’autres raisons et rejoignent un poste à salaire équivalent voire inférieur ! La majorité d’entre eux évoquent le manque de reconnaissance ou de sentiment d’appartenance, ainsi qu’un mauvais équilibre vie professionnelle / vie personnelle. Pourtant, les managers n’ont pas toujours conscience de ces motifs. Après la raison financière, ils pointent davantage les raisons personnelles telles que la famille, l’éducation des enfants ou encore les préoccupations liées au COVID-19 comme motifs de démission.

D’ailleurs, la pandémie a poussé de nombreux collaborateurs en quête de sens dans leur travail a démissionner pour aspirer à un nouvel emploi. C’est le cas de Charlotte Brun, Consultante spécialisée en achats de voyages professionnels, un secteur fortement touché par la crise sanitaire qui a vu son activité drastiquement réduire en 2020. C’est pendant cette période de remise en question qu’est née la volonté de Charlotte de se lancer dans une expérience plus manuelle : la pâtisserie.

Pour d’autres collaborateurs, démissionner et rejoindre une nouvelle entreprise leur permet de se développer professionnellement. Certains tentent également l’aventure entrepreneuriale.

Pourquoi reviennent-ils ?

Après avoir démissionné et rejoint une nouvelle entreprise, certains collaborateurs regrettent leur ancien poste. D’après l’enquête UKG, les salariés boomerang reviennent en majorité pour les collègues (38%) et le confort lié à la connaissance du poste (31%). Tester plusieurs cultures d’entreprise leur permet de comprendre ce qu’ils recherchent réellement dans un travail et bien souvent, de se rendre compte de la valeur de leur ancien poste.

Charlotte Brun se confie : « Travailler en pâtisserie m’a fait réaliser les aspects positifs du travail de Consultante que je ne voyais plus depuis longtemps : le confort des conditions de travail et l’équilibre de vie pro/perso. Le métier de pâtissier est très fatigant. »

Tandis que certains reviennent par nostalgie de leur ancien emploi, d’autres le font pour des raisons stratégiques. En effet, après être rapidement montés en compétences grâce à leur nouvelle expérience professionnelle, les collaborateurs renouent avec leur ancien employeur en vue d’endosser plus de responsabilités et d’évoluer plus rapidement que s’ils étaient restés dans leur poste. Un coup de poker pour le salarié.

 

Les salariés boomerang perturbent les standards de recrutement

Le retour d’anciens collaborateurs bousculent les codes de l’entreprise et du management. Les réembaucher, est-ce vraiment la solution ? Comment faut-il s’y prendre ?

Faut-il réembaucher les salariés boomerang ?

Oui, il faut les réembaucher

Premièrement, un collaborateur qui a travaillé dans une autre structure a acquis de nouvelles compétences pouvant être mobilisées à son retour dans l’entreprise. Le salarié boomerang revient plus expérimenté, plus impliqué, avec des idées nouvelles et un regard neuf. Cette prise de recul est très bénéfique pour l’entreprise et peut être un élément moteur pour les équipes de travail.

Clara Trevisiol, dirigeante de Monabee, s’exprime au sujet du retour d’un de ses anciens commerciaux : « Notre salarié est revenu avec beaucoup de motivation, d’énergie et d’engagement. Nous avions confiance en lui et en la qualité de son travail ». 

Pour Charlotte Brun, même si le secteur de la pâtisserie est très différent, il a été fort enrichissant : elle a gagné en ouverture d’esprit et a acquis des compétences managériales grâce à la formation d’apprentis. Elle confirme : « Je n’ai pas de regret car je suis allée au bout de mon projet. Cette expérience m’a beaucoup appris et m’a permis de changer de vision sur mon travail de Consultante. Je suis aujourd’hui beaucoup plus motivée et épanouie ».

Contrairement à ce que l’on peut penser, le salarié boomerang fait preuve de fidélité et d’un attachement profond à son employeur. Travailler ailleurs lui a ouvert les yeux sur les avantages de son ancienne entreprise. S’il revient, c’est qu’il apprécie ses valeurs et qu’il s’y projette à long terme. Le collaborateur est, qui plus est, reconnaissant de bénéficier d’une seconde chance et souhaite faire ses preuves.

Le salarié boomerang a l’avantage de s’intégrer plus vite qu’une nouvelle recrue. Il connaît déjà les modes de fonctionnement, les spécificités organisationnelles et la culture d’entreprise. Il est donc plus rapidement opérationnel, autonome et performant. En définitive, un processus d’intégration réduit et moins coûteux !

Cette pratique de recrutement permet également de limiter les erreurs de casting car l’entreprise connaît déjà le collaborateur, ses capacités, son implication dans son travail et ses relations avec son manager et ses collègues. Clara Trevisiol confirme : « Réembaucher un ancien salarié qui connaît déjà l’entreprise, le secteur et les process présente beaucoup moins d’incertitudes qu’une nouvelle recrue. On sait que ça va fonctionner. Dans la mesure où il avait démissionné proprement et honnêtement, nous étions prêts à lui donner une seconde chance ».

En outre, le salarié boomerang est un véritable relais de la marque employeur et permet de renforcer la culture d’entreprise. Le message envoyé par l’entreprise est en effet très positif : celui d’une certaine liberté, ouverture d’esprit et expérimentation offertes aux salariés. Le retour d’un ancien salarié participe donc à la rétention des talents en interne. Le reste de l’équipe se rend compte de l’attractivité de leur entreprise et de l’intérêt qu’elle porte à chacun de ses employés. Un phénomène qui fidélise et décourage les autres collaborateurs de démissionner à leur tour.

Chez Monabee, la direction a profité de cette opportunité de réembauche pour en faire un exemple : « Ce retour montre à nos autres salariés qu’ils ont le droit de partir et de revenir s’ils le font correctement. Mais également qu’il est bon de travailler chez nous, que l’herbe n’est pas plus verte ailleurs et que nous respectons nos valeurs : bienveillance, honnêteté et transparence. »


Non, réintégrer un ancien salarié peut constituer une menace

Attention, réembaucher présente aussi des risques. Plusieurs paramètres sont à prendre en compte.

Tout d’abord, il faut se pencher sur l’évolution de la culture d’entreprise. A-t-elle beaucoup changé depuis le départ du salarié ? Ce dernier peut ne plus se reconnaître dans la nouvelle politique d’entreprise et ainsi être moins engagé et motivé au quotidien. Cet élément est d’autant plus important à prendre en compte si le salarié boomerang est parti il y a longtemps.

Il est également nécessaire de s’interroger sur l’adéquation du poste avec le salarié boomerang. Réembaucher une ancienne recrue constitue en effet de nombreux avantages en termes de délais et de coûts. Toutefois, bien plus qu’une facilité d’embauche, il faut avant tout s’assurer qu’il s’agisse du meilleur candidat pour le poste et les enjeux actuels de l’entreprise.

Souvent bien accueillie par les autres collaborateurs, la réintégration d’un ancien salarié peut néanmoins être jugée par certains. Et ce, d’autant plus si le salarié boomerang obtient un meilleur poste à son retour. Frustrés de ne pas bénéficier des mêmes avantages que lui alors qu’ils sont restés fidèles à l’entreprise, ces collaborateurs peuvent penser qu’il est préférable de démissionner puis revenir pour espérer obtenir une promotion. Pour éviter une telle situation, il est indispensable de bien communiquer avec ses équipes sur les raisons qui ont motivé le salarié à partir puis à revenir mais également sur les bénéfices que sa réembauche apporte à tout le monde.

Enfin, le risque d’une double démission n’est pas écarté. D’après l’étude UKG, 47% des salariés boomerang envisagent de démissionner à nouveau. Mais ce risque peut nettement être réduit si le manager soigne le re-onboarding du salarié et s’il répond à ses nouvelles attentes évoquées lors de sa réembauche : « Je reviens avec un projet et des nouveaux objectifs d’évolution » souligne Charlotte Brun.

Comment réintégrer les salariés boomerang ?

La réintégration d’un salarié boomerang ne débute pas à son retour. Il faut l’anticiper et ainsi la préparer en trois temps : à son départ, pendant son absence et à son retour.

AU DÉPART DU SALARIÉ

Lorsqu’un salarié démissionne, il est essentiel de comprendre les causes de son départ. Cela débute par une phase de diagnostic : Pourquoi le salarié veut-il partir ? Qu’est-ce qui lui manque actuellement ? Qu’est-ce qui l’attire ailleurs ? Ces informations permettent d’identifier ses attentes professionnelles futures et ainsi pouvoir le relancer dès qu’une opportunité susceptible de lui plaire surgit. De plus, cela permet de repérer les points faibles de son entreprise pouvant être améliorés et ainsi éviter d’autres démissions potentielles. Pendant l’entretien de départ, il est également possible de dire à son collaborateur qu’il peut revenir s’il le souhaite. L’idée est de lui faire vivre une dernière expérience positive avec l’entreprise.

« Au début, j’avais peur d’évoquer le sujet avec mon manager mais j’ai finalement été agréablement surprise de sa réaction. Il s’est montré très positif, flexible et encourageant dans l’aboutissement de mon projet », déclare Charlotte Brun.

PENDANT L’ABSENCE DU SALARIÉ

Ce n’est pas parce que le collaborateur est parti qu’il faut couper les ponts avec lui, bien au contraire ! Son ancien manager doit s’efforcer de prendre des nouvelles régulièrement. En effet, la rupture d’un collaborateur avec son ancienne entreprise n’est pas définitive. D’après UKG, en France, 63% des démissionnaires estiment qu’ils ont fait un choix précipité, et 60% d’entre eux déclarent qu’ils étaient mieux dans leur ancien poste. Maintenir le lien permet alors à l’entreprise de rester dans l’esprit de son ancien collaborateur et ainsi augmenter ses chances de renouer avec lui.

Comment maintenir ce lien ? LinkedIn est aujourd’hui un excellent moyen pour rester attentif à l’activité d’un ancien collaborateur et pouvoir rentrer facilement en contact avec lui. De plus, la création et l’animation d’un réseau alumni composé d’anciens collaborateurs permettent à l’entreprise de se constituer un réseau de potentiels salariés boomerang.

AU RETOUR DU SALARIÉ

Il est primordial de soigner le re-onboarding du salarié boomerang. Tout d’abord, son manager doit l’informer des nouveautés, de l’historique de l’entreprise pendant son absence, des nouveaux outils adoptés et des changements au sein des équipes. Exemple chez Monabee où une semaine de formation sur le nouveau modèle de vente adopté par l’entreprise a été organisée. Le retour du collaborateur a été annoncé dans la newsletter interne et lors de la réunion commerciale mensuelle avec tous les vendeurs. Le salarié a également eu l’occasion de prendre la parole devant ses collègues pour annoncer et expliquer son retour.

Un entretien doit également traiter des raisons qui ont poussé le collaborateur à revenir dans l’entreprise. L’occasion pour le manager de déceler ses motivations et de prendre en compte ses attentes en lien avec les causes du départ : une promotion, plus de flexibilité, plus d’autonomie, plus d’avantages…

Quitter une entreprise n’est pas la trahir. Cette envie d’expérimentation grandissante que l’on constate chez les salariés boomerang les pousse à vivre de nouvelles expériences. Autrefois considéré comme une déloyauté, le phénomène boomerang est aujourd’hui valorisé. Les modes de travail ont évolué et les entreprises se montrent désormais plus tolérantes et ouvertes face aux départs et aux retours potentiels. La réembauche d’un ancien salarié peut en effet s’avérer très prometteuse pour l’entreprise, à condition qu’elle se fasse correctement.
 


Faire revenir un ancien collaborateur, c’est bien. Le fidéliser dès le départ, c’est mieux.

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(1) Enquête UKG de 2022 menée dans 6 pays dont la France auprès de 1950 démissionnaires et 1850 managers dont un des membres de l’équipe a démissionné

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